Hyperthermie du Motard


Motard en danger

En moto, lors des longs trajets effectués par forte chaleur, la température s’accroît sous le casque et le blouson. Les vêtements, notamment lorsqu’ils sont serrés ou parfaitement étanches, empêchent l’évacuation de la chaleur par un phénomène d’étuve.

Si en plus, comme moi, vous roulez sur un bicylindre refroidi par air chaud, vous savez que cet air remonte et vient titiller l’arrière de vos cuisses jusqu’à y déposer quelques rougeurs.


Bref, vous chauffez en haut, vous brûlez en bas, vous dégoulinez en dedans et le papier colle aux bonbons (oui, j'aime aussi la poésie).


En résumé, vous surchauffez !


Cette situation n’est pas anodine et doit être prise en compte rapidement. Plusieurs cas de décès de motards liés à l’hyperthermie sont connus, notamment sur le Paris-Dakar, le dernier en 2015 concernait un motard polonais : Michal Hernik (ci-dessous). Cependant, compte tenu du contexte particulier de cette compétition, il est difficile de dire précisément si le coup de chaleur relevait de l’effort ou de la température ambiante. Vraisemblablement les deux me répondrez-vous !


En général, les personnes les plus vulnérables sont les personnes de forte corpulence ou âgées. Ce qui n’est pas le cas chez les bikers ou les riders.

Les échanges thermiques naturels



Tandis que notre activité quotidienne engendre la production de chaleur corporelle, la peau fait fonction d’isolant thermique. Lorsque nous sommes en bonne santé, les variations de notre température interne dépendent donc de notre activité du moment, de la température ambiante, du temps passé dans ces conditions « surchauffées » et de la capacité de notre peau à remplir sa fonction.

Les échanges thermiques entre notre corps et notre environnement résultent directement de 4 phénomènes de régulation susceptibles d’élever (thermogénèse) ou d’abaisser (thermolyse) notre température corporelle (température centrale) :


1. L’évaporation, se fait principalement par la transpiration dès que la température extérieure est plus élevée que la température centrale. Autre possibilité, la respiration dont la phase de l’expiration permet le rejet de l’air chaud et celle de l’inspiration l’introduction d’air à température ambiante.


2. L’irradiation, qui correspond à l’émission d’ondes de chaleur en provenance du soleil par exemple, qui élève notre température centrale. A l’inverse, l’irradiation issue de notre corps (ondes infrarouges) le refroidit.


3. La convection, qui est un transfert de la chaleur ou du froid par des fluides aérauliques et parfois liquides.


4. La conduction, qui procède à un transfert de chaleur ou du froid par contact ou à travers la masse.

La survenue de ces phénomènes agit sur des thermo-capteurs situés en surface du corps, au niveau de la peau, ou plus profondément implantés, au niveau d’organes nobles (foie, cerveau, etc.).


Ces capteurs déclenchent un mécanisme de thermorégulation corporelle qui est orchestré par l’hypothalamus (à ne pas confondre avec Hippopotamus) dans le but de maintenir notre température centrale aux alentours de 37°c.

Les causes de l'hyperthermie



Une longue exposition au soleil (insolation), est du domaine du possible en moto, souvent accompagnée de brûlures (rougeurs) sur les parties découvertes du corps (bras, poignets, nuque, etc.).


Une chaleur ambiante trop importante, en cas de canicule notamment (coup de chaleur), est le cas le plus fréquent en moto, en été ou dans les pays chauds, lors de longs trajets.


Une activité physique intense qui provoque un coup de chaleur d'effort (production de température endogène supérieure aux capacités d’évacuation du corps). Cette hypothèse reste farfelue pour le rider ou le biker lambda, sauf si vous courrez à côté de votre bécane.

Dans ce dernier cas, la température extérieure n’est pas forcément élevée.

Symptômes et conséquences de l’hyperthermie



Les lèvres sèches et une soif intense sont des signes annonciateurs de la déshydratation engendrée par la perte d’eau et de sels minéraux en quantité importante dans l’organisme.


Des crampes, dans les jambes ou l’abdomen, peuvent apparaitre suite à une perte conséquente de sodium et de chlore lors d’une sudation abondante, suivie d’une fatigue anormale et d’un arrêt de la sudation.


Par la suite, un changement d’aspect de la peau, de la fièvre, des maux de tête, peuvent survenir, des troubles de la vision et des vomissements également.


Enfin, des vertiges, des troubles neurologiques tels que des délires, des hallucinations, des convulsions, un rétrécissement pupillaire (myosis), voire un coma peuvent aussi se produire.


L’irréversibilité de ces troubles neurologiques et des conséquences létales ne sont pas à négliger au-delà de 41 °c.


L'hypertermie combinée à une insolation, la peau est à la fois brûlante, rouge et sèche, avec un pouls très élevé et des maux de tête ou des vertiges. L’insolation combine l’élévation de la température centrale et les brûlures, généralement du 1er degré (rougeur).

Mécanismes physiologiques de compensation



En cas de chaleur importante et prolongée :


La vasodilatation de la peau (augmentation de la dimension des pores) ramène la chaleur à la surface du corps afin de faciliter son évacuation.

La transpiration à la surface de la peau évacue la chaleur et abaisse la température corporelle. En contrepartie, elle engendre la déshydratation. On note également que l’évaporation par sudation ne peut pas se faire dans les pays chauds et humides.


La vasodilatation des vaisseaux (augmentation du diamètre des vaisseaux) accélère le transport par le sang de la chaleur produite par le métabolisme vers la surface de notre corps en vue de son évacuation à travers la peau. Mais dès que la température ambiante est supérieure à celle du corps, le phénomène s’inverse et l’augmentation du flux sanguin accélère le réchauffement corporel.


La réduction de la pression sanguine est une cause à effet de la vasodilatation et de la déshydratation. L’élévation de la température interne et la vasodilatation qui en résultent font que le coeur augmente de 50 à 70% la fréquence de ses pulsations pour remplir les vaisseaux sanguins devenus plus larges.


Si le processus de refroidissement de l’organisme ne fonctionne pas rapidement, les organes nobles, tel que le cerveau, vont souffrir du manque d’oxygène que le sang transporte.

Comment éviter la surchauffe ?



Dans les régions et les pays chauds, roulez à la fraîche et évitez les heures les plus chaudes.


Jusqu’à 37°c, adoptez une tenue ventilée, ne portez pas de vêtements serrés, mais plutôt des vêtements respirants de type Gore-Tex, afin de conserver une circulation d’air autour du corps.

Isolez la peau de l’air ambiant dès 38 degrés et restez couvert. Lorsque la température ambiante dépasse votre température centrale, le corps se réchauffe au contact de l’air. Portez un tour de cou humide, voire détrempé, recouvrant l’intégralité de la nuque. Renouvelez l’humidification du tour de cou avant qu’il ne soit sec afin de refroidir les carotides par lesquelles le cerveau est irrigué.


Faîtes des pauses fréquentes dans des lieux climatisés, au frais, ou, à défaut, à l’ombre et déshabillez-vous pour favoriser les échanges thermiques. Le must en la matière est de porter un gilet réfrigérant que l’on trouve aujourd’hui dans le commerce.

Hydratez-vous tout au long de la journée à raison d’un ½ litre d’eau par heure.


Les sodas et autres boissons gazeuses sont à éviter, ainsi que l’alcool qui impose une montée en température du corps pour leur assimilation, notamment la bière qui est en plus un diurétique alors que votre corps souffre déjà d’un déficit d’eau.


Si les crampes sont vraiment fortes, il faut boire de l’eau salée toutes les 15 minutes pendant une heure, le sel fixant l’eau.

Conduite à tenir lors d'une hyperthermie



Elle peut se concevoir en deux épisodes.


Le 1er de ces épisodes concerne les soins immédiats pour éviter une issue létale.

Alertez les secours (15 pour le Samu – 112 pour les pompiers) et dans l’attente refroidissez la victime à tout prix en l’humidifiant avec du linge mouillé, en la ventilant, en la « brumisant ».


Dans les cas extrêmes, disposez des poches de glace sous les aisselles, au niveau du pli de chaque aine, sous la nuque. La glace ne doit jamais être en contact direct avec la peau afin d’éviter les brûlures par le froid.

Hydratez la victime avec des solutés de réhydratation vendus en pharmacie. A défaut, préparez vous-même une boisson réhydratante en mélangeant un litre d’eau, deux cuillerées à soupe de sucre ou de miel, un quart de cuillerée à café de sel et le jus d’une orange (pas de jus en bouteille).


Une position allongée avec les jambes relevées permettra de concentrer le sang sur les organes vitaux. Si la victime perd connaissance, il faut la basculer sur le côté pour qu’en cas de vomissements les poumons ne soient pas inondés suite à la perte du reflexe de déglutition.


Ne donnez ni paracétamol (inefficace), ni aspirine pour faire baisser la fièvre, susceptible d’altérer la régulation thermique spontanée déclenchée par l’organisme.

Le 2ème épisode du traitement correspond à la prise en charge de la victime par une unité médicalisée, avec injection de solutions salines en intraveineuse, oxygène, etc.

Cet épisode relevant de la médicalisation du sujet, Mesamiscustom laisse le soin aux personnes qualifiées de le développer.

Yfor 2019-03